Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
mimifantomas85
1 mars 2011

Il faut oublier, tout peut s'oublier...

Chère Annie, non, je ne vous ai pas oublié, et vous n’avez pas non plus oublié mon prénom, je vous rassure car nous ne nous connaissions pas. Pas avant hier, au moment de l’annonce de votre décès. Je dois vous avouer que je vous connaissais peu, peut-être juste quelques images par ci par là de films où vous apparaissiez, je me souviens ainsi de « la Zizanie »…et puis bien sûr il y a ces apparitions dans les médias, avec cette voix rocailleuse, marquée par l’empreinte des gitanes que vous fumiez, cette gouaille inimitable, ce débit de parole si rapide et surtout ce ton, cette sincérité, cette fraicheur d’esprit dans un monde parfois bien trop aseptisé. Chère Annie, il faut croire que vous n’avez pas oublié de nous jouer un dernier pied de nez malgré votre maladie, oui, la semaine de votre disparition c’est un peu comme si le monde entier avait eu tendance à tout oublier. Oublier d’abord les heures où le colonel Kadhafi était un dirigeant respectable, où le tapis rouge lui était déroulé et où on le laissait planter sa tente au beau milieu de résidences officielles. Oublier les relations étroites avec un pays comme la Lybie pendant tant d’années, tout comme avec la Tunisie, oubliant ainsi toutes les exactions commises par des dirigeants rendus totalement fous par la soif du pouvoir et par l’argent qu’ils savaient si bien garder au détriment de leur peuple. C’est un peu comme si nous avions eu d’un coup un éclair de lucidité en nous disant « tiens mais au fait, il n’est pas très gentil Kadhafi, faudrait voir pour dire que ce qu’il fait c’est pas joli joli ». Un oubli sûrement. Oublier que l’on va en vacances dans un pays en proie à des manifestations violentes alors que l’on est ministre des affaires étrangères, vous conviendrez, ma chère Annie, que c’est un peu ballot. Et pourtant, pourtant, c’est ce qui est arrivé à Michelle Alliot-Marie, notre éphémère ministre qui n’a rien trouvé de mieux que d’aller en Tunisie se faire dorer la pilule à Noël alors qu’il y avait une révolte populaire et qui ensuite s’est accroché à son poste, oubliant, elle aussi, qu’elle faisait du tort à tout un gouvernement pour ne pas dire tout un pays sur la scène internationale. On va oublier petit à petit Michelle Alliot-Marie car elle a été remplacée par Alain Juppé. Vous vous souvenez de lui Annie ?  Si, Alain Juppé, un petit nouveau, déjà ministre depuis les années 80, ces années où vous avez connu une certaine traversée du désert en matière de tournages ; ministre des affaires étrangères dans le gouvernement d’Edouard Balladur et puis premier ministre entre 1995 et 1997, là vous devez vous en souvenir car entre ces deux années, en 1996, vous aviez prononcé un discours particulièrement émouvant au moment de recevoir un César. Et bien, on avait un peu oublié Juppé et il revient, un éternel recommencement la politique vous savez, et on se demande si parfois on ne préfèrerait pas oublier le passé. Non, très chère Annie, nous ne vous avions pas oublié, pas depuis que vous étiez devenue l’une des porte-parole, peut être malgré toi, d’une maladie qui va toucher de plus en plus de personnes dans les années à venir et qui a pour seul conséquence d’effacer une mémoire souvent riche, la maladie d’Alzheimer. Vous ne vous souveniez plus d’avoir été actrice ces derniers mois, vous reconnaissiez à peine les gens de votre entourage, quoi de plus douloureux pour une femme ou un homme que de perdre petit à petit son identité. Nos souvenirs, notre passé, c’est notre vie, ça construit notre futur, sans cela nous ne sommes plus rien, nous n’avons plus de raison de vivre, voilà pourquoi Annie je voudrais vous dire que j’ai décidé cette semaine de me souvenir de ces trois dernières années. Pourquoi seulement les trois dernières ? Tout simplement parce que ce sont les années que j’ai vécu dans un appartement que j’ai profondément aimé et que je vais quitter. Impossible de l’oublier mais, contrairement à vous, je me souviens de chaque instant passé ici, des histoires, des rires, des moments de doutes, des moments tranquilles, de l’amour qui est apparu au détour d’un quai de gare et qui a investi cet espace que je croyais à tout jamais immobile et solitaire. Dix mois de souvenirs, dix mois de choses tellement agréables, dix mois d’une première étape qui n’est qu’un marche pied vers une nouvelle ère, vers un nouveau logement, vers tout simplement une nouvelle vie. Je voulais donc vous écrire, Annie, ce soir, pour vous dire merci, merci de me permettre de prendre conscience que mes souvenirs s’empilent dans les cartons de ma mémoire, que j’ai la chance de pouvoir les conserver et que grâce à eux, je vais désormais écrire une nouvelle page, un nouveau chapitre d’un livre que j’ai commencé à écrire voilà maintenant 31 ans…

Publicité
Publicité
Commentaires
mimifantomas85
Publicité
Archives
mimifantomas85
Publicité